Bienvenu MABILEMONO La Cuvette-Ouest, 50 ans de
Bienvenu MABILEMONO
La Cuvette-Ouest, 50 ans de mépris et d’isolement
C’est une longue histoire qui date de notre indépendance, donc une histoire de 50 ans.
a- La Cuvette-Ouest, je m’en souviens, au départ ce n’était pas une cause
Nos populations, dans leur rencontre avec les populations du groupe Mbochi tel que défini par le Pr Obenga, à savoir, (les Kouyou, les Makoua, les Mbochi, les Bangala pour couper court, qui auraient le même ancêtre), vivaient cela comme de simples stéréotypes, quelques moqueries passagères : « mbéré ba ndizikini », autrement dit, des moins que rien, « a mbéré a bé mina ma bonga na kaya », des propos méprisants.
Mais nos populations, pour les avoir trouvés souvent sans des vêtements adéquats, car ils ne maîtrisaient pas encore la civilisation du raphia (les gens qui portaient des raphia étaient des notables), pour les avoir vu manger du poisson pas bien cuit (comme s’ils mangeaient du beefsteak saignant), pour les avoir trouvés un peu turbulents, incontrôlables, un peu violents en paroles, les traitaient d’andzobo (comparés à l’arbre racine qui pousse dans tous les sens dans l’eau, donc des gens qui manquaient de sagesse et de maturité, des gens sans têtes, des écervelés, autrement dit, une forme de mépris supérieur). Pendant que les uns exhibaient le couteau pour démontrer leur force en se blessant superficiellement, les autres utilisaient le « croumbala » (le pongo, autrement dit, les techniques de luttes) parce que pour ces derniers, l’utilisation du couteau impliquait donner la mort et non s’exhiber. Donc, ils se redoutaient mutuellement et se respectaient.
Ces rencontres se faisaient à Makoua, à Boundji, à Lékety chez les prêtres catholiques, à l’occasion de l’apprentissage du catéchisme ou à l’école en lingala ou en français.
Jusque-là, cela a été sans gravité, cela relevait de ce que l’on pourrait appeler le choc des cultures, prévisible en pareilles circonstances. Tout le monde relevait de la colonisation, donc pas d’esprit de domination des uns sur les autres.
b- Voici qu’arrive l’indépendance
1- Le leader politique connu et reconnu du Nord est jacques Opangault
Tout le monde s’aligne derrière lui. Cependant, ceux qui lui resteront fidèles jusqu’au bout de son combat, ce sont les Mbéré, les Téké, les Ngaré, les Mboko, les Mongome et les Bakota, tous de la Cuvette-Ouest actuelle.
Les leaders Mbochi, comme Létembé Ambily, les quitteront ; celui-ci deviendra même le directeur de cabinet de Youlou. Les Kouyou le quitteront aussi et lui interdiront même de battre campagne à Fort-Rousset (Owando). Les leaders de Mossaka le quitteront aussi.
Mais ce qui va marquer toute cette période d’après l’indépendance, de la région de la Likouala-Mossaka à la région de la Cuvette, ce sont les velléités de divisions de cette région en plusieurs régions. Opangault, déçu des kouyou, va créer la région dite de l’Alima avec capitale Ewo, mais rapidement transférée à Boundji, son propre district.
Les gens de Mossaka lui emboiteront le pas avec la création de la région autonome de Mossaka. Les Makoua de leur coté, entreront dans le jeu avec l’intention de créer la région de l’Equateur, avec capitale Makoua.
Les seuls qui n’avaient jamais eu de revendication autonomiste furent les ressortissants de l’actuelle Cuvette-Ouest. C’est d’ailleurs grâce à eux que cette région de la Cuvette a pu subsister dans toutes ses dimensions jusqu’à l’arrivée de Ngouabi aux affaires.
2- Quand Ngouabi arrive aux affaires
Un pacte politique est signé entre les Makoua et les Kouyou en 1968 à Owando au cours d’une réunion solennelle qui a réuni les sages des deux districts, des deux ethnies, présidée par l’inspecteur de la jeunesse et des sports, Beri Jean pierre. Au cours de cette réunion, les sages prendront l’engagement de taire leurs antagonismes anciens et de soutenir le fils du coin qui vient d’arriver aux affaires. En bon révolutionnaire, le président Ngouabi a même voulu dissimuler cet accord secret pour ne pas susciter une vague contagieuse (il craignait que les autres groupes ethniques ne fassent autant). Ce pacte a été tout naturellement élargi aux Mbochi et aux gens de Mossaka.
Du coup, l’unité politique de l’actuelle Cuvette centrale était non seulement faite, mais scellée : on peut avoir des problèmes entre individus, mais l’unité doit se faire autour de la conservation du pouvoir. On peut même s’alterner au pouvoir, l’essentiel c’est qu’on le garde.
Ngouabi s’en va dans des conditions dramatiques, Sassou vient et aucun procès d’Etat n’est fait pour établir la responsabilité de l’Etat. Sassou fait un coup d’Etat constitutionnel contre Yhombi, tout le groupe Mbochi se tait et se range derrière le nouveau chef. A noter qu’avant même que Sassou ne renverse Yhombi, Yoka Emmanuel avait averti Yhombi en lui disant que Sassou voulait l’enlever, et Yhombi d’appeler Sassou et de demander à Yoka de répéter devant Sassou ce qu’il venait de lui dire. Pour autant, Sassou n’a jamais écarté Yoka.
Malgré l’intermède Lissouba, le pacte se reconstitue. Même Yhombi qui était avec Lissouba et qui a fait la guerre de son coté, sera le premier à demander à tout le groupe Mbochi, et même tous les cadres politiques du Nord de se mettre derrière Sassou. C’est un pacte terrible, c’est même maléfique si on veut voir les choses logiquement. L’essentiel c’est que le pouvoir soit conservé dans le groupe.
Durant le régime de Lissouba, on a même assisté à des faits très troublants, où, quand Yhombi, Premier ministre, fait bombarder Bacongo, habitant Mpila, lorsque quelques membres de l’alliance URD-FDU suggèrent qu’il soit localisé et neutralisé pour lui demander d’arrêter les bombardements sur Bacongo, le groupe Mbochi qui était là s’y était opposé catégoriquement. Sassou en premier, refuse.
Autre fait troublant, Yhombi, Premier ministre, est prié par le pouvoir de quitter son poste, mais il refuse de partir, sauf si une motion de censure est votée contre lui à l’assemblée nationale comme le prévoyait la Constitution. Alors la bande des quatre (Moukouéké, Moungounga, Tamba-Tamba, Mbéri Martin) décide de passer à l’offensive et demande à s’allier aux députés de l’alliance URD-FDU pour faire partir Yhombi. Et c’est Sassou qui demande à Lékoundzou de faire en sorte que son groupe politique mette tout en œuvre pour empêcher ce vote.
Encore un autre fait troublant, c’est bien Yhombi qui présente Kolelas à Lissouba au moment de la nomination de ce dernier au poste de Premier ministre au nom de l’ERDUN, et pendant la guerre, c’est même lui, Yhombi, qui demandera qu’on donne des moyens à Kolelas, alors Premier ministre, pour qu’il puisse défendre le régime. Et malgré tout cela, même condamné après la victoire militaire de Sassou, sa grâce lui a été accordée sans condition. On voit bien qu’il y a là manifestement un pacte secret entre eux. Sassou a incontestablement protégé plusieurs fois Yhombi et Yhombi a aussi protégé Sassou plusieurs fois. Donc il y a quelque chose de très fort entre eux.
Pour la conservation de son pouvoir, Sassou préfère aller chercher des alliances au Nord avec les gens de la Likouala, de la Sangha et des Plateaux, au Sud, avec les gens du Pool, du Niari, de la Bouenza, de la Lékoumou et du Kouilou, mais jamais avec les gens de la Cuvette-Ouest. C’est dire que la relation entre le groupe Mbochi et les ressortissants de la Cuvette-Ouest est donc passée de simples stéréotypes, de quelques moqueries que l’on pouvait mettre tout simplement sur le compte du choc des cultures, à un vrai désir de domination, voire même de maltraitance. S’agissant de Sassou, on pourrait même dire que c’est une vengeance. En effet, il a gardé dent aux gens de la Cuvette-Ouest tout simplement parce qu’un ministre originaire de la Cuvette-Ouest, en la personne d’Okomba Faustin, ne l’aurait semble-t-il, pas aidé pour lui permettre d’entrer en seconde après son BEPC.
c- Mais qui a payé ce pacte du groupe Mbochi ?
1- La Cuvette-Ouest par son abandon, son enclavement, son arriération et parfois elle a payé cela de son sang.
L’illusion d’un pouvoir du Nord tombe en effet d’elle-même dès qu’on s’intéresse au sort de la région de la cuvette-ouest.
1.1- La cuvette-ouest est une région abandonnée
Sur les cinquante ans d’indépendance, les fils de la Cuvette centrale règnent depuis 37 ans vécus par les gens du Sud comme un pouvoir nordiste.
Imaginez-vous que lorsque le Président Ngouabi arrive au pouvoir en 1968, il trouve un projet ficelé sur le plan technique (des études) et du financement (financement FED) laissé par le gouvernement Lissouba sous Massamba-Débat, de la construction d’un hôpital de plus de 300 lits à Etoumbi, la cité industrielle et ouvrière la plus importante de toute la région nord du Congo, plus de 1000 travailleurs à l’époque, la plus cosmopolite aussi par la représentation des ethnies de Nord et du Sud, le président Ngouabi décide d’arrêter ce projet sous le prétexte qu’il allait construire un hôpital général à Fort-Rousset (Owando), capitale de la région, et qu’il ne fallait pas que nos compatriotes du Sud du pays le taxe de favoritisme à l’égard du Nord par la construction de deux grands hôpitaux dans une même région.
Du coup, c’est plusieurs emplois directs et indirects qui sont refusés à cette localité (Etoumbi), et quand on sait que dans nos pays d’Afrique, on considère que sur dix personnes, quatre sont ou sont susceptibles de tomber malade, avec un tel hôpital de plus de 300 lits, ce sont tous les besoins en santé de l’actuelle Cuvette-Ouest qui seraient couverts.
On peut se demander aujourd’hui si l’hôpital général d’Owando (ex-Fort-Rousset) couvre les besoins en santé de toute la Cuvette ou de toute la partie nord du pays. Même M. Sassou devenu Président a été obligé de construire son propre hôpital qui porte d’ailleurs le nom de sa mère et qui ouvre les besoins sanitaires de son peuple Mbochi.
Ngouabi a même arrêté net un projet laissé par la compagnie française du haut et du Bas Congo (CFHBC) qui gérait toutes les palmerais du Nord du Congo (palmeraie d’Etoumbi, Mbomo palmerais de Linengué à Owando (Fort-Rousset, palmerais de Tchicapika, palmerais de Mokeko (Ouesso), qui consistait à installer une usine de transformation d’huile de palme à Mossaka (parce que c’est le croisement) et pour la fabrication du savon et d’autres ingrédients, et depuis là ces palmerais ont été abandonnées et livrées à des voleurs avec l’argent de l’Etat.
Savez-vous que lors de la création du CNR après la prise du pouvoir par Ngouabi, la seule personnalité de l’actuelle Cuvette-Ouest-ouest qui était en position de jouer un grand rôle était Ossoula Victor (originaire de Kellé) ? Il fut soigneusement écarté sous le prétexte qu’il ne participait pas aux travaux des assemblées
Ngouabi avait oublié qu’en 1966, lors de sa première arrestation et de sa dégradation au grade de soldat de 2è classe, en ce qui concerne la grande Cuvette, la plupart des militaires qui avaient pris le risque de le soutenir publiquement étaient de la Cuvette-ouest : les Apangha Ignace (ressortissant de Kellé), les Ondzemba Denis (ressortissant de Mbama), la Masse (un ressortissant d’Ewo), etc., et même des civils habillés en militaires (comme Jean Joseph William Otta). Les Kouyou qu’on distinguait étaient plus les propres parents de Ngouabi, parce que la plupart des officiers le considéraient comme « un chercheur d’histoires ». A cette date, M. Sassou et les autres dignitaires du pouvoir actuel n’étaient pas visibles. Ce n’est qu’en 1968, lorsque l’homme politique Ngouabi était déjà né, qu’on les a vus. Nous prenons comme témoins de ces événements, l’ingénieur agronome Ondzé Mamboukou, à l’époque étudiant, parent de Ngouabi, qui sous Yhombi sera nommé commissaire du gouvernement à Ouesso et qui était même arrêté à la suite de ces événements de 1966. Tous ces éléments de la Cuvette-Ouest avaient d’ailleurs été éloignés de Brazzaville comme sanction politique.
Malgré toute cette implication des ressortissants de la Cuvette-Ouest, le Président Ngouabi n’a jamais mis en orbite un seul homme politique de la Cuvette-Ouest. Même Apangha qui ne jurait que pour Ngouabi, qu’il appelait le baron, qui était prêt à sacrifier sa vie pour lui, a subi le régime de Ngouabi, d’abord par une prison et une bastonnade, accusé d’avoir fomenté un coup d’Etat avec son frère Bongho Nouarra, lui-même arrêté et bastonné, pour un coup d’Etat imaginaire. Ensuite on le révoquera de l’armée après avoir été exposé à la vindicte populaire des Lari et des Bacongo parce que lors d’un exercice militaire, deux soldats Lari ou Bacongo s’étaient noyés dans le Djoué sous son commandement, alors qu’on lui demandait de forger une garde présidentielle apte à toute épreuve.
Sans oublier le cas de Lekondza André (alias Aleck), un officier originaire de Mbomo, dont la vaillance était connue depuis l’armée française, qui aura d’abord été maltraité au plan de sa carrière, alors que le 31 juillet 1968 s’il avait usé de la force, lui qui avait la garde présidentielle et les blindés, Ngouabi ne serait jamais arrivé au pouvoir. Du reste, il fera toujours partie de quelques détenus de la République qui devaient systématiquement se présenter à l’Etat-major pour se dédouaner d’un coup d’Etat éventuel.
Le président Ngouabi ira même très loin dans l’erreur lorsque après les assassinats des Mbéré à Owando en 1976, il permettra aux assassins originaires de son district (Owando) d’organiser leur propre procès afin de se disculper, où les Okoko Jacques seront à la fois juges et parties. A ce sujet, il faut dire qu’une affaire montée de toutes pièces est à l’origine de ce problème. En effet, un chef de district Kouyou se rendra à Etoumbi pour on ne sait trop quelle raison et il sera tué. Les Kouyou vont alors accuser les mbéré et crier vengeance. C’est alors qu’ils vont se mettre à tuer les mbéré à Owando sur l’instigation notamment des gens comme Yhombi (qui leur dira même « mais qu’est-ce que vous attendez pour le venger ? »). Mais en réalité, il semble que ce soient les Kouyou eux-mêmes qui avaient assassiné ce chef de district et avaient mis l’affaire sur le dos des mbéré.
1.2- Quand Sassou arrive au pouvoir en 1979
De 1979 à 1992, la liste des cadres de la Cuvette-Ouest élevés à des hautes fonctions, n’est pas vraiment longue. On pouvait citer indifféremment : Emouengué Gabriel (ressortissant de Kellé) comme maire de Brazzaville, Obembé Jean François (à l’époque il était de Makoua et ensuite il est devenu d’Etoumbi après la création du district d’Etoumbi), comme membre du comité central du PCT, chargé de l’organisation ayant rang de ministre, Ngayama Jacques (ressortissant d’Okoyo) comme Secrétaire d’Etat à la coopération et la francophonie pendant à peine un an ; Otta Casimir (originaire de Kellé) qui avait été tout simplement confirmé au poste car il était déjà DG de la CNSS sous le régime précédent aidé en cela par ses anciens collègues de l’école primaire d’Owando, Ngouabi et Yhombi ; Nzila Pierre (ressortissant d’Okoyo) comme DG de l’enseignement secondaire, Banangandzala Jacques (ressortissant de Yaba Mbeti - Ewo) comme DG de l’Imprimerie nationale, Douma (ressortissant d’Ewo) comme DRH d’Hydro-Congo, Otta Jean Joseph William comme DG de la CNSS pendant 5 mois à peine, opposé habilement à son propre frère Otta Casimir, l’objectif étant de libérer un poste juteux qu’il fallait donner aux proches. Celui-ci sera condamné par la suite à manger du bois ou du charbon (sic), c’est-à-dire à chômer jusqu’à la retraite.
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Fort heureusement, une telle dent criminelle gardée à l’égard d’un haut fonctionnaire, ayant pour objectif d’anéantir toute une famille à travers le chef est vécue par l’intéressé avec beaucoup de philosophie et jugée par lui comme une preuve supplémentaire entrant dans son combat d’humanisation du pays pour la démocratie et l’Etat de droit. C’est pour cela que, pour notre part, nous le considérons comme un grand sage.
Lors de la rencontre des ressortissants de la Cuvette-Ouest avec Sassou pendant le forum de 1998, Sassou avait vanté la nomination d’Emouengué comme maire de Brazzaville qui était pour lui le symbole de la participation des ressortissants de la Cuvette-Ouest à son pouvoir.
Ce qu’il avait oublié de dire c’est que ce n’était pas par hasard qu’il avait nommé Emouengué. Emouengué faisait partie des ténors qui ont installé Sassou contre son propre frère Yhombi au pouvoir en 1979 par leur prise de parole à la radio et à la télévision, et il avait aussi une milice à sa disposition en tant maire de Ouenzé. Donc il n’était pas une force négligeable. Dans le coup d’Etat du 5 février 1979, Emouengué avait la même dimension que l’éternel ministre Ntsiba Florent (on peut même dire qu’Emouengué était un volontariste dans ce mouvement car tout le monde redoutait les Kouyou, donc en réalité, il n’a même pas été récompensé à la hauteur de sa participation)
Mais la véritable raison du mépris de Sassou à l’égard des ressortissants de la Cuvette-Ouest, il l’avait dévoilée lors de sa rencontre avec quelques frères de la Cuvette-Ouest à Oyo en 1991. Pour lui, la plus grande injustice qu’on ait pu lui faire de son existence, c’est celle de ne lui avoir pas permis de faire une classe de Seconde car il en avait les capacités (selon lui) et tenait à continuer ses études au lycée Pierre Savorgnan de Brazza, le ministre Okomba Faustin, ressortissant de la Cuvette-Ouest (le père de l’épouse de Jean François Dengué), considéré comme l’homme politique de Nord, à qui il aurait soumis son sort pour son inscription en Seconde, ne l’aurait pas aidé. C’est donc un peu naturel que les siens payent à sa place. Cela a été dit avec beaucoup de cynisme mais c’est la vérité. Cela est même relaté dans son livre « le manguier, le fleuve et la souris) sans bien sûr citer le nom d’Okomba Faustin, mais au cours de cette rencontre à Oyo, il l’a bien précisé.
Voici donc que tout un peuple va payer le comportement d’un ministre de la république et l’on comprend mieux pourquoi ce monsieur (Okomba Faustin) est mort dans le total oubli, sans fonction alors qu’il était fonctionnaire, inspecteur des PTT. D’aucuns lui reprochant d’avoir été choisi par Youlou pour former avec lui un ticket commun Président/Vice-président dans le cadre de la Constitution en révision, et d’autres de ne les avoir pas aidés (on lui a même couché sa femmes, ses enfants…)
Sassou est présenté comme un brillant élève, un bosseur etc. ; s’il avait fait une Seconde, il aurait fait une Première, une Terminale, l’université, il serait devenu soit médecin ou docteur dans une discipline. Airait-il été au rendez-vous de son histoire et de son destin depuis 1963 ? (je rappelle que le jour où Youlou présente sa démission, lui, il assurait la garde à la présidence). Combien de docteurs sont devenus présidents de la république au Congo ou en Afrique en dehors de Lissouba qui n’a pas su profiter de la chance exceptionnelle qu’il avait eu face aux putschistes, toujours prêts à rengainer pour prendre ou conserver le pouvoir ? Lissouba a même réduit la crédibilité des intellectuels par ses agissements.
Cependant, force est de constater que Sassou, sous Sassou I, a manqué à son devoir de chef d’un état, chef d’une république, chef d’une nation en condamnant tout un peuple, le peuple de ma Cuvette-Ouest, en méprisant ses cadres formés, compétents et expérimentés, même les plus concurrentiels au plan national en les humiliant.
Pour symboliser cette situation d’abandon et de mépris sous Sassou I, nos parents prenaient comme exemple, l’installation de la télévision dans la région dont l’antenne de réception tournait le dos à la cuvette-ouest. Ils disaient que « vraiment ces gens ne nous aiment, ils nous coupent du monde ».
1.3- Sous Sassou II
Point n’est besoin de relater quoi que ce soit. Chacun peut faire son constat. La cuvette-ouest est toujours enclavée, arriérée etc.., la mobilisation des cadres de cette contrée et leur utilisation qui avait bien démarré sous Lissouba ont baissé. Les cadres sont devenus interchangeables. On les oppose les uns aux autres dans une course au pouvoir sans fin. Il n’y a aucun projet économique important dans cette région. Même le projet du barrage d’adinga à Etoumbi (une grande chute d’eau) pourtant retenu dans le projet du plan quinquennal de Sassou I a été abandonné parce qu’on a choisi de construire le barrage d’Imboulou. En fait c’est pour alimenter en électricité le territoire Mbochi et créer des emplois qui seront occupés en priorité par les ressortissants du coin.
Pour nous résumer, voyez par vous-même que ce qui était au départ un choc e culture sous la domination coloniale es devenu, grâce à l’exercice d’un pourvoir clientéliste, clanique et familial, un instrument de mépris et de domination des uns sur les autres. Ce n’est pas une critique abstraite mais ce sont des faits qui parlent d’eux-mêmes. Nous pensons que cette approche doit être claire dans nos esprits. Nous les ressortissants de la cuvette-ouest en général, nous avons tendance à oublier qu’en politique, on sait que qu’on existe que dans les rapports de forces. Les gens de la Likouala ont compris cela depuis toujours, les gens des plateaux, les gens du pool, les gens de la Bouenza, les gens Niari, les gens du Kouilou et même les gens de la Lékoumou, encore que ce n’est pas toujours vrai chez ceux-là. Mais ce qui peut nous conforter, c’est que l’humiliation des peuples, l’asservissement des peuples conduit toujours au ressentiment des mêmes peuples et à la révolte.
Pour ceux qui ne le savent pas, Mr Sassou est devenu président du Congo parce qu’il avait pris conscience du mépris que les Kouyou au pouvoir avaient à l’égard des autres Mbochi et même à son propre égard le traitant de femme dans la succession éventuelle à Ngouabi, qui malheureusement était fils unique et manquait de soutiens véritables dans le groupe. Il mettra en place un cercle de réflexion et d’actions composé de lui-même, à l’époque membre du bureau politique chargé des organisations des masses, de son neveu Mbossa Jean comme directeur de cabinet, qu’il ne gardera pas longtemps, parce que trop « Brazzavillois », de son cousin Oko Camille, de son neveu Okemba Jean Dominique et de son autre neveu Okouéré. Le seul collaborateur de la cuvette-ouest sera son chauffeur, Ngabié Antoine (un militaire ressortissant de Kellé) qui sera pris vivant avec le lieutenant Oppossi au Trésor public lors de la guerre par les Cocoyes et assassinés à la présidence aux plateaux et les parents n’ont jamais été indemnisés. Il était membre du Bureau Poltique et ce titre ça c’est cabinet politique, donc son cabinet de combat, où s’asseye et on dit on fait quoi. Ce cercle va grandir au fur et à mesure de son combat, élargi aux Mbochi des Plateaux et à ses propres relations ; et surtout il protégé par le président Ngouabi et même par Yhombi. En réalité les Kouyou ont perdu le pouvoir parce que Ngouabi avait favorisé Sassou.
Sassou nous a démontré qu’il est un grand stratège politique que le pays ait connu. Il ne faut jamais le sous-estimer. Tout cela, c’est pour montrer la force du ressentiment. En fait il a simplement appliqué ce que nous les tékés nous disons l’héritage de l’orphelin profite toujours à celui qui sait le servir.
Les rapports des ressortissants de la cuvette-ouest avec ceux de la cuvette centrale sont devenus une cause de combat tout au long des 50 années d’indépendance. En 1991, dans l’effervescence de la Conférence Nationale, les causes anciennes er les plus récentes se sont conjuguées et ont amené certains de nos frères à donner forme à ce combat. Pour symboliser ce combat, voici un message qu’un de nos aînés (Jean Joseph William OTTA) a eu à soumettre au Président du Présidium de la Conférence nationale qui expose bien tour le sens de notre lutte :
« Dans un pays, lorsque l’intérêt supérieur de la nation n’est plus le moteur de l’évolution, surtout lorsqu’il y a démission de l’Etat central devant sa mission historique d’intégration nationale, il s’en suit forcément une désagrégation de la société et chaque communauté, par instinct de conservation, est contrainte à un repli sur soi. Le Congo c’est 342 000 Km2 de superficie et près de 3 millions d’Habitants, toute politique, tout développement qui ne prend pas appui sur ces fondations, crée des frustrations et au bout du compte le ressentiment qui a toujours été le moteur de l’histoire. Monsieur le Président, la Cuvette-Ouest est une région enclavée, une région abandonnée depuis l’indépendance. Certes, d’autres régions de notre pays connaissent le même sort. Dès lors, il s’agit d’un problème, d’un problème immense, tellement sérieux, un problème politique qu’il faut poser comme cas de conscience nationale à la Conférence Nationale. L’Association Cuvette-Ouest qui soutient cette cause et entend l’exprimer publiquement, est une Association éminemment politique et non un ramassis ou une bande d’agitateurs comme le soutient le pouvoir. Nous exigeons de participer à la Conférence comme toutes les autres forces vives du pays. »
Il s’agit donc d’une volonté populaire qui ne peut être réduite par des intérêts individuels. Et nous savons qu’il se mijote un projet du démembrement de notre région. En voici les tenants et aboutissants :
B- La Cuvette-Ouest à la vie
a- Rapide rappel historique
Pour la cuvette-Ouest, avant même la Conférence Nationale, il y avait le Comité central du PCT qui devait se réunir pour se renouveler, et les ressortissants de la Cuvette-Ouest avaient compris qu’il fallait faire un peu d’agitation, faire un peu pression en se mettant en ordre de bataille derrière Obembé Jean François et Emouengué Gabriel pour qu’ils rentrent au Bureau Politique.
Au même moment arrive Jacques Ndomba (Géomètre) qui rentre de France et qui ramène des ballons et des équipements sportifs. Dans la foulée, les gens se sont organisés en associations pour envoyer ces équipements sportifs aux populations de la région.
Pour Ewo et Mbama, l’association créée sera « Lessampali », pour Kellé, l’association « Oyessé », pour Mbomo, l’association « Mbana Mbomo ». Okoyo et Lékety n’avaient pas voulu participé à ce mouvement.
On donne les résultats du Comité Central et du Bureau Politique, Emouengué et Obembé ne sont envoyés au Bureau Politique.
Au niveau du Nord du pays, des gens comme Mierassa Clément sont exclus même du Comité Central, lui, il va faire alliance avec Gangara Nkoua, et les autres exclus du Comité Central originaires du Sud, qui étaient aussi mécontents comme les Thystère Tchicaya, les Itadi Jean…; donc cette dynamique de mécontentement va éclore. Il ne faut pas oublier que nous avons à cette période le discours de la Baule.
Après le discours de François Mitterrand à la Baule, les intentions et des ambitions des uns et des autres vont se manifestées et même des velléités de coup de force pour changer les choses.
Les Nzé Pierre, les Ndalla Claude Ernest… qui étaient à la touche, certains contacts sont établis, des réunions se font (chez Itadi Jean). Apparemment, il fallait un chef de tout cela. Ils sont allés demander à Kolelas Bernard (des gens comme Thystère Tchicaya sont allés voir Kolelas pour lui demander de prendre la tête du mouvement) et la tendance la plus forte va se mettre derrière Lissouba Pascal qui en ce moment là est au Kenya, toutes ces tendances ont travaillé un peu pour Lissouba.
La stratégie va donc être celle de rédiger une lettre ouverte nationale ; qui sera appuyée des lettres ouvertes régionales. Cette lettre ouverte au niveau national, aura les signatures de tout ce monde, les Mierassa, les Gangara…
Et dans la foulée, il va avoir une lettre de la Cuvette-Ouest, qui sera signée, pour Kellé, au nom de l’association « Oyessé » par Jean Pierre Engoualé ; au nom de l’association « Lessampali » pour Ewo et Mbama, par André Youomi ; pour Mbomo, au nom de l’association « Mbana Mbomo », c’est Boukaka Nicolas qui va signer. Entre temps une coordination de ces associations de la Cuvette-Ouest est mise place, et donc Aloïse Songo qui va signer au nom de la coordination et il sera en quelque sorte le chef de la coordination (il est de Mbama).
Entre temps, on va quand même procéder à des arrestations pour toutes les régions. Pour le Nord, sont arrêtés, Gangara, Mierassa, le colonel Lomane de la Sangha.
Dans le cadre de ces arrestations, on va arrêter Gambeg pour avoir signé la lettre ouverte nationale. Et puis on va avoir un amalgame entre la lettre nationale et la lettre de la cuvette-ouest. Et ceux de la Cuvette-Ouest qui vont arrêtés, c’est Engoualé (Kellé) et le Docteur Sita (qui lui, est à la fois d’Etoumbi et du Pool). Dans la foulée aussi Kolelas crée son parti, le MCDDI, donc il le sera le premier à profiter de la situation au niveau structurel.
Finalement Sassou est submergé par toute cette vague d’agitation et pour court-circuiter les uns et les autres, puisqu’il savait que les gens travaillaient au bénéfice de Lissouba, il appelle Lissouba pour le nommer Premier ministre.
Dans les lettres ouvertes (la lettre nationale et les lettres régionales), on exigeait la tenue d’une Conférence nationale, et puisque Sassou ne voulait pas de cette conférence nationale (on se vient même, quand il tournait autour de la chaise à la télé en disant, c’est ma place que vous voulez ? Vous voulez de mon poste, mais vous ne l’aurez pas).
Débordé, il fait appel à Lissouba. Mais quand Lissouba arrive, le groupe qui travaillait pour lui, fait pression et lui demande de ne pas accepter cette offre en l’état et lui demande faire dépendre cette nomination à la tenue d’une Conférence nationale. Ce qu’il va soumettre à Sassou et demande à s’allier à lui tactiquement.
Il y avait même eu une tentative à l’assemblée demandant qu’on prolonge son mandat. C’est en ce moment que son ami et collègue Mberi Martin va vouloir faire aboutir cette demande mais vainement puisque les députés, par exemple du Nibolek, et même son propre beau-frère Poungui Ange Edouard, tout le monde se désolidarisait de lui. Donc il n’avait pas d’autre choix que d’accepter le mouvement.
Entre temps, Kolelas qui s’est pris très tôt dans l’organisation de ses forces en créant plusieurs associations en vue de la préparation de la Conférence Nationale, aura un avantage sur tous les autres ; ce qui fait que son groupe sera majoritaire à cette assemblée. Le PCT, y compris même ceux qui étaient du coté de Lissouba, ils avaient un dilemme, à savoir, est-ce qu’il fallait créer des associations au détriment du PCT et surtout comment faire représenter le PCT qui n’avait jamais été crée légalement ? Il leur fallait refaire des statuts le règlement intérieur car le PCT était crée de façon réglementaire. Donc le temps qu’ils tergiversent et qu’ils fassent tout pour se mettre dans la légalité, Kolelas avait déjà occupé le terrain politique, car il y avait une effervescence terrible, tout le monde créé son parti. Et malgré la démarche unitaire de créer un grand parti autour de Lissouba, les gens du Nibolek crée leur propre parti, l’UPADS.
Alors comment s’organise la Cuvette-ouest à cette époque d’effervescence nationale ?
Les trois districts, Ewo, Kellé et Mbomo, à travers leurs associations, se mettent aussi en mouvement. A Kellé, c’est Otta William qui prend la tête d’Oyessé à l’instigation de ses frères alors que ce dernier prenait ses distances vis-à-vis du mouvement qu’il voyait sporadique, à Ewo, c’est Douma (alors DRH d’Hydro Congo) qui prend la tête de l’association Lessampali, à Mbomo, c’est toujours Boukaka. Entre temps, Okoyo s’est réveillé (après la visite d’Oyo).
Ewo et Mbama sont toujours ensemble. Et par une entremise jamais expliquée, la Cuvette-Ouest en gestation va être reçue par Sassou à Oyo. Nous avons dit mystérieuse entremise parce même la délégation elle-même, même les initiateurs eux-mêmes, ne pouvaient pas préciser si c’est eux qui avaient sollicité l’audience ou si c’est Sassou qui avait demandé à les rencontrer.
Une délégation va être constituée, composée de : Aloïse Songo, Otta William, Lékoba Jean Pierre, Banangandzala Jacques (Directeur de l’imprimerie nationale sous Sassou I), Boukaka, Engoualé, le colonel Lekondza André (alias Aleck), Douma (DRH d’hydro-Congo) et Ombacka Ekori Raymond.
Et une fois à Oyo, lorsqu’il s’est agit de prendre les responsabilités de l’entretien, c’est-à-dire de définir la stratégie et le contenu de ce qu’il fallait dire, tout le monde a décliné, et c’est ainsi que Otta William va devenir le leader malgré lui par la préparation de cette rencontre et l’exposé des motifs. Cet exposé va créer l’étonnement chez Sassou qui ne s’attendait certainement pas à un tel discours, s’attendant peut-être à une réconciliation entre frères de la région (la Cuvette). C’est peut être tout cela qui explique toute la dent gardée contre Otta William par la suite. Encore qu’il l’avait mis en garde contre la versatilité de ses frères qui ne chercheraient que des postes.
De retour à Brazzaville, ce message est mis en forme et devient le premier document, l’acte fondateur de la Cuvette-Ouest.
Au retour d’Oyo, les choses s’accélèrent, les associations des quatre districts (Ewo, Okoyo, Kellé et Mbomo) et des deux PCA (Etoumbi et Mbama) décident de donner un statut à la région par la création d’une association dite de la Cuvette-Ouest.
L’association est finalement mise en place sous la présidence des travaux par Otta William, une présidence tournante est instituée par ordre alphabétique. En premier, la présidence devait être assumée par Ewo (et Mbama compris), ensuite Kellé, puis Mbomo et enfin Okoyo.
Il est envisagé la création d’un parti politique qui s’appellera le PRDC. Normalement la Cuvette-Ouest devait être à la Conférence Nationale au moins à ces deux niveaux. Entre temps Gambeg et Andely Beeve ont crée chacun leur parti politique. Mais la mise en marche de cette association dite Cuvette-Ouest et du PRDC va poser problème, ceux qui devaient déposer les statuts pour lui donner forme légale ne l’ont jamais fait et vont cacher cette défaillance aux autres membres du groupe (ceux qui devaient déposer les statuts sont Lékoba Jean Pierre, Banangandzala Jacques et Aloïse Songo), ce qui fait l’association était officiellement inexistante.
Quant au parti politique, le PRDC, les mêmes qui appartenaient déjà à d’autres partis, n’ont plus voulu faire partie du PRDC, estimant que le PRDC devait être simplement un symbole de combat de la région et un réservoir, plus exactement une position de repli au cas où ça ne marcherait pas là-bas dans d’autres partis, alors on revient. Il fallait donc une période d’attente ou d’observation. Alors c’est ainsi qu’Engoualé prendra la décision d’être le Président de ce parti et il va déposer les statuts de son parti. Ignorant totalement que les statuts de la Cuvette-Ouest n’avaient pas été déposés, bien que DG du Centre nation de gestion (CENAGES), donc ayant une présence presque statutaire à la future Conférence nationale, Otta William décide de poursuivre le combat de l’association Cuvette-Ouest. Néanmoins il prendra le soin de diriger vers le PRDC, dont lui-même devait être le chargé de l’organisation, les ressortissants de la Cuvette-Ouest qui en avaient envie. C’est ainsi que les gens comme Oyali Martin vont aller à la Conférence Nationale, il dirigera même vers d’autres partis des cadres de la Cuvette-Ouest qui prendront des grandes responsabilités au sortir de la Conférence Nationale.
Bongho Nouarra qui rentre de France, sans attache politique stable, rejoint le PRDC d’Engoualé qui lui cède la direction.
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Au total la Cuvette-Ouest sera représentée à la Conférence Nationale par le PRDC, l’association politique de Léfouoba Grégoire crée entre temps, les partis de Gambeg Yvon Norbert et d’Andely Beeve, etc.…
Il convient donc de relever que la Cuvette-Ouest en tant qu’association politique aurait joué un rôle déterminant dans la vie politique du pays. Nous avions là une occasion exceptionnelle de nous affirmer dans le pays. C’est d’ailleurs à cause de cela que nous n’aurons pas des sénateurs lors de la première législature.
Malgré toutes ces péripéties, la Cuvette-Ouest en tant qu’association informelle est mise en application à Ewo, nous sommes déjà sous le régime de Lissouba. A la fin du mandat de Lessampali, arrive donc le tour d’Oyessé, dirigée par Jean Joseph William Otta. Mais la division entre les partisans de Lissouba de la Cuvette-Ouest et ceux, membres de l’alliance URD-FDU, va susciter une réaction négative et violente des partisans de Lissouba, dirigée en premier par les ressortissants de Kellé. Et ça été la mort de l’association Cuvette-ouest.
La Cuvette-Ouest était morte de son propre venin suite à des manipulations de tous genres. Depuis là, d’autres forces politiques ont pu naître dans la région, les gens sont devenus des députés, des ministres, des sénateurs, des préfets, ils se battent pour cela, ils se font la guerre pour cela, comme l’avait prédit Sassou à Oyo, mais ce qui reste constant, c’est qu’il n’existe pas de force politique véritable qui canalise ce combat de la Cuvette-Ouest. Des ténors comme jean joseph William Otta payent dans l’isolement la revanche de Sassou, qui finalement n’a jamais gobé ce crime de lèse majesté, d’avoir été déstabilisé.
b- La création sous le régime de Pascal Lissouba
Créé par loi n°2-95 du 18 février 1995, le département de la Cuvette-Ouest couvre une superficie de 27 200 km² (c’est-à-dire à peu près la même superficie que celle du Burundi, du Rwanda ou de la Guinée Equatoriale) et compte six districts, à savoir : Mbomo, Kellé, Ewo, Okoyo, Mbama et Etoumbi ; pour une population totale de 73 011 Habitants. Il est limitrophe avec les départements de la Sangha, au Nord, de la Cuvette centrale, à l’Est et des Plateaux, au Sud, ainsi qu’avec le Gabon, notamment la Province du Haut-Ogooué. Sa capitale est Ewo.
Historiquement, la Cuvette-Ouest faisait partie sous la colonisation de l’espace administratif qui comportait cinq districts de plein exercice, à savoir : Makoua, Fort-Rousset (Owando), Mossaka, Ewo et Kellé. Les six districts qui forment la Cuvette-Ouest, Mbomo, Kellé, Ewo, Okoyo, Mbama et Etoumbi, proviennent de l’ancien district d’Ewo. Les districts de Mbama et d’Etoumbi, jadis PCA, ont été érigés en district par la loi n°19-95 du 18 septembre 1995.
La Cuvette-Ouest est donc aujourd’hui une entité administrative. Cependant, elle n’est pas définie, ou est mal définie. En effet, le décret définissant ses limites n’a jamais été pris ; ce qui sur le plan des manœuvres politiques, expose ce département à des démembrements éventuels. Par exemple, la limite entre le district d’Etoumbi et celui de Makoua est la rivière « doulou » à 5 km du district centre administratif. Pourtant la distance entre Etoumbi et Makoua s’étend sur environ 95 km, et la frontière est fixée à seulement 5 Km d’Etoumbi. Cette délimitation date de l’époque où les « Makoua » voulaient avoir avec eux les « Ngaré » dans une future région à créer, dite région de l’Equateur, ayant comme chef-lieu Makoua district, ou au besoin, Etoumbi, mais distincte d’Owando à cause de leurs antagonismes anciens.
c- La Cuvette-ouest pour la vie
Cette question de la définition des limites et de la superficie de la Cuvette-Ouest est une question éminemment politique qui doit être prise au sérieux. En effet, des indices sérieux et concordants nous laissent penser que le pouvoir actuel, en se cachant derrière le SNAT (Schéma national d’aménagement du territoire), nouveau cadre de référence de l’action territoriale de l’Etat, des collectivités locales et des entreprises qui s’inscrit dans une vision prospective spatiale sur l’horizon temporel de 2025 ; s’emploierait discrètement à la création d’une nouvelle région baptisée « région de l’Alima » qui aurait pour chef-lieu Oyo.
Il se trouve en effet, que contrairement à la définition légale de l’espace du département telle qu’elle a été retenue dans notre pays, le SNAT retient une autre définition qui crée des régions dites économiques et des zones d’aménagement. Ce qui implique que le département de la Cuvette-Ouest ferait l’objet d’un redécoupage qui donnerait lieu à un rattachement « économique » de quatre de ses six districts aux départements voisins pour constituer les fameuses « régions économiques » du SNAT, sur une base dite de similitudes des réalités physiques. La doctrine officielle affirme que le SNAT répond à un devoir de solidarité et de renforcement des responsabilités des collectivités locales tout en prenant en compte la responsabilité stratégique et à long terme de l’Etat central.
De ce redécoupage du SNAT, il découlerait une nouvelle division du pays en six « régions économiques » et onze zones d’aménagement (voir carte ci-dessous). Mais en réalité, cela donnerait lieu à un démembrement du département de la Cuvette-Ouest, qui ne dit pas son nom, qui fragiliserait davantage ce département en le vidant de toute sa substance. Selon cette doctrine du SNAT, ce redécoupage de la Cuvette-Ouest donnerait naissance à la « région économique » dite du centre qui comprendrait trois zones d’aménagement définies comme suit :
1- les districts de Mbomo, de Kellé et d’Etoumbi seront rattachés aux districts de Sembé et de Souanké (département de la Sangha) et formeront la zone d’aménagement dite à potentiel minier, qui inclura également le Parc National d’Odzala ;
2- le district d’Okoyo sera quant à lui rattaché aux districts d’Oyo, de Boundji et d’Allembé (département de la Cuvette centrale), et aux districts d’Abala, d’Ollombo, de Tchicapika et d’Ongogni (département des Plateaux) et formeront la zone d’aménagement dite de l’Alima dont l’objet principal serait prétendument la viabilisation de la route Léconi (Gabon) - Lékety - Obouya qui offrirait, semble-t-il, des opportunités d’investissements privés à moyen terme et de développement des activités agro-pastorales et de pêche (comme si ces opportunités ne seraient pas envisageables sans ce rattachement d’Okoyo et Lékety à Oyo ?) ;
3- et enfin, les districts d’Ewo et de Mbama seront isolés dans une zone d’aménagement appelée la zone d’aménagement d’Ewo, dont l’objectif serait la valorisation du potentiel agro-pastoral.
Nous l’avons dit, il s’agit là d’un problème politique. Nous estimons donc que nous sommes dans notre bon droit lorsque nous nous interrogeant sur les véritables motivations du pouvoir actuel qui se cache derrière ce soi-disant redécoupage « économique » qui, au fond, n’est qu’une manœuvre politicienne visant à démembrer de fait ce département dont la création en 1995 est restée au travers de la gorge de ceux-là mêmes qui ne voulaient pas en attendre parler, prétextant l’unicité de la Cuvette.
Pour notre part, nous suspectons le pouvoir actuel qui a toujours redouté la proximité géographique et hautement stratégique de la Cuvette-Ouest avec le Gabon voisin, de vouloir se donner une frontière terrestre directe avec le Gabon à travers ce rattachement artificiel, pour ne pas dire contre nature, d’Okoyo et Lékety à Oyo sous le couvert de la fameuse zone « économique » de l’Alima. Nous n’accepterons jamais le démembrement de notre région ; nous considérons que chaque région à sa vocation et doit se construire dans le cadre d’une décentralisation effective.
C’est vous dire que cette région de la Cuvette-Ouest est avant tout le résultat d’un combat, un long combat. Comme tout combat, il y a eu des causes anciennes et celles plus récentes. C’est une longue histoire qui date de notre indépendance, donc une histoire de 50 ans. Nos aînés qui ont donné forme à ce combat pour qu’il aboutisse, nous avaient demandé de retenir la divise suivante : « Cuvette-Ouest, je me souviens » ; peut être qu’au sortir, d’ici, nous dirons « Cuvette-Ouest à la vie », comme lorsque les Juifs dans l’exode regagnaient la Palestine. Donc, il y a un combat à la vie. Quant aux jeunes que nous sommes, si voulons connaître les problèmes de notre sous-région, nous avons là un bon sujet de recherche. Car il y a là une histoire à établir, celle de la Cuvette-Ouest. La Cuvette-Ouest fut un cri de douleur de nos populations, faute de traitement adéquat ou de guérison, elle est devenue une souffrance. Je pense que tout le monde en convient.
d- Comment sortir la Cuvette-Ouest de son enclavement et de son isolement ?
A l’instar de tout le pays, le principal problème de la Cuvette-Ouest est celui de la construction des routes et des ouvrages de ponts sur les fleuves et les nombreux marigots qui existent dans cette région. Les communications sont impossibles dans cette région par manque de ponts et de routes, bien sûr. Par exemple entre les districts de Mbomo et d’Etoumbi, on utilise un bac de franchissement qui ne fonctionne pas toujours. Comment voulez-vous dans ces conditions promouvoir le tourisme dans le parc d’Odzala, qui serait une source de revenus importante pour la région ? Entre le district d’Okoyo et celui d’Abala, on utilise également un bac de franchissement qui ne fonctionne pas toujours. Un pont en béton sur l’Alima entre Lékety et Lékana ouvrirait aux ressortissants de la Cuvette-Ouest une voie directe sur les Plateaux, sur le Pool, sur la Lékoumou, la Bouenza, le Niari, le Kouilou (Pointe-Noire et son Port) et donc sur le monde. Cette route fut la route du sel et des échanges économiques et humains, de là est née la fraternité téké-vili appelée « motéké ngoundou, vili ngoundou », autrement dit, nous sommes des frères, entre le royaume téké du roi Makoko et le royaume Loango du roi Maloango.
Un pont en béton sur le « kouyou » entre Mbama et le district de Ngoko ouvrirait les portes sur Owando et sur la Nationale n°2. Un pont en béton sur la « Lekouona » à Kellé et une route par voie de conséquence, ouvrirait la voie sur Mbomo et sur le Gabon, et de Mbomo sur la Sangha (Sembé, Souanké). Un pont en béton sur « Lassebé » entre le Congo et le Gabon, ouvrirait la voie sur Okondza et Franceville. La liste est très longue et un pouvoir qui veut vraiment développer cette région devrait commencer par là, non pas par des opérations d’éclat, ponctuelles, mais comme projet d’un Etat et de société avec des budgets de l’Etat inscrits chaque année dans la loi des Finances et surtout pas par un endettement extérieur dont l’obtention prend toujours beaucoup du temps, car il y a urgence. Pour ce qui est des routes, elles sont toutes à faire ; et aujourd’hui entre Okoyo et Ewo il n’y a pas de route, chaque automobiliste trace sa route.
Montrons l’absurdité de ce qui se passe aujourd’hui : Quand vous êtes dans le district de Lékana, précisément à Ampaka, vous êtes grosso modo à moins d’une heure de Lékety et de Léconi, ville frontière avec le Gabon, s’il y avait un pont. Imaginons que quelqu’un est à Lékana et qu’il veuille se rendre à Lékety, il doit aller à Djambala – Ngo – Gamboma – Ollombo – Oyo – Obouya – Boundji – Okoyo pour arriver à Lékety. Vu l’état des routes, vous pouvez facilement faire trois jours sur ce long trajet. C’est vraiment absurde, n’est-ce pas ?
Pour désenclaver la Cuvette-ouest, il faut impérativement construire l’axe dorsal qui va de Mbomo (plus précisément de Makakou, frontière du Gabon) à Etoumbi, Ewo, Okoyo, Lékety, Ampaka, Lékana. Ensuite construire les bretelles suivantes :
- Makoua – Kellé jusqu’à la frontière avec Okondza (Gabon) ;
- Ewo – Mbama (frontière à la Ngoko)
- Boundji - Ewo
- Obouya – Okoyo – Lékety – Léconi (frontière du Gabon)
Tout pouvoir qui veut vraiment aider cette région, qui veut vraiment la sortir de son enclavement et de son isolement, doit pouvoir réaliser ces ouvrages vitaux. Sinon, on aura beau faire des municipalisations accélérées dans ce département, ça sera toujours de la poudre aux yeux.
Voici à peu près l’éventail des principaux ponts à construire ou à moderniser :
1/ la modernisation du pont sur le Kouyou entre Boundji et Ewo à 2 km d’Ewo,
2/ la construction d’un pont en béton sur l’Alima entre Ampaka, district de Lékana, et Lékety (Lékéty-Diélé où l’Alima prend naissance), district d’Okoyo ;
3/ la construction d’un pont en béton sur l’Alima entre le district d’Okoyo et le district d’Abala,
4/ la construction d’un pont en béton sur la dzouassi entre Mboma, district d’Ewo, et Etoumbi, par Okabombo
5/ la construction d’un pont en béton sur le fleuve entre Ewo et Ekéyi,
6/ la construction d’un pont en béton entre Ekéyi et Kélikou,
7/ la construction d’un pont en béton sur la Lola avant Ntsama,
8/ la construction d’un pont en béton à Obli sur la Lola,
9/ la construction d’un pont en béton sur la Lola à Ololi vers Etoumbi,
10/ la construction d’un pont en béton sur la Lékouona à Etoumbi vers Mbomo,
11/ la modernisation du pont sur la Lékoli construit en 1950 entre Etoumbi et Kellé,
12/ la construction d’un pont en béton sur la Sébé vers le Gabon,
13/ la construction d’un pont en béton sur la Lékouona à Kellé,
14/ la construction d’un pont en béton sur le fleuve à Etiyi
15/ la construction d’un pont en béton entre Opigui et Lemvouli,
16/ la construction d’un pont en béton entre youlokoyo et Onguiya,
Autres principaux ouvrages à construire :
1- la route départementale reliant Mbomo-Mambili ;
2- la route nationale reliant Makoua – Etoumbi – Kellé – Oboko – Oyabi – Akana, frontière Gabon ;
3- la route nationale reliant Owando – Ngoko - Ewo ;
4- la route départementale reliant Boundji - Ewo ;
5- la route départementale reliant Ewo – Mbama – Etoumbi ;
6- la route nationale reliant Obouya – Boundji – Okoyo – Lékety – Mbié, frontière Gabon ;
7- la route départementale reliant Gamboma – Ossele - Okoyo avec pont en béton sur l’Alima ;
8- la route départementale reliant Lékana – Ampaka – Lékety avec pont en béton sur l’Alima ;
9- la route départementale reliant Ewo – Etiyi – Onguiya- Opigui – Lemvouli – Okounda – Vaga, jusqu’à la frontière du Gabon ;
10- la construction d’un hôpital moderne de référence à Ewo ;
11- la construction d’un lycée d’enseignement général à Ewo ;
12- la construction d’un aéroport moderne à Ewo ;
13- la construction d’une usine d’eau à Ewo ;
14- la construction d’un barrage hydro-électrique sur le site de boubou, sur les chutes d’Adinga à Etoumbi où le projet du barrage avait d’ailleurs déjà été retenu dans le projet du plan quinquennal de Sassou I en 1985 ;
15- la construction d’un stade omnisports à Ewo ;
16- la construction d’un aérodrome à Odzala (le Parc national d’Odzala situé au nord ouest du bassin du fleuve Congo couvre une superficie de 13 200 Km². Il a été crée le 13 avril 1935 ce site touristique regroupe une diversité de milieux tout à fait exceptionnelle, issue des variations climatiques des derniers millénaires) ;
17- etc.
C’est pour démontrer que le problème central de cette région, c’est bien celui de la construction des ouvrages de ponts et des routes. Et chacun conviendra avec nous que ce n’est donc pas une municipalisation limitée dans le temps (soit 9 mois) qui va permettre de réaliser ces ouvrages. Il convient de souligner à ce sujet qu’au Gabon, où ce concept de la municipalisation tournante a été inventé, le gouvernement du feu-Président Omar Bongo Ondimba consacrait une période de quatre années de travaux à chaque département avant d’y célébrer les festivités de l’indépendance.
e- La question cruciale de l’utilisation des cadres de la Cuvette-Ouest
Comme chacun le sait, l’autre problème de la Cuvette-ouest, c’est celui de la participation de ses élites à la détermination des politiques nationales et à la gestion des affaires. Les ressortissants de la Cuvette-Ouest ont toujours été insuffisamment impliqués dans la gestion du pays. Ce problème, avait déjà été posé à Sassou à Oyo en 1991 par nos Frères qui militaient pour la création de cette région, bien avant même la Conférence Nationale Souveraine.
En 1963, quand Okomba Faustin, ressortissant de la Cuvette-Ouest (plus précisément de Kellé), quitte le gouvernement après la chute du Président Youlou, il a fallu attendre 1989, soit vingt-six ans, c’est-à-dire plus d’un quart de siècle pour qu’un ressortissant de la Cuvette-Ouest soit nommé Secrétaire d’Etat à la coopération, en la personne de Ngayama Pascal, qui sera dans la foulée nommé représentant du Congo à l’OUA. Certes, sous Massamba-Débat, Maurice Stéphane Bongho Nouarra, ressortissant de la Cuvette-Ouest (son père était de Mbama), avait d’abord été nommé Secrétaire d’Etat et ensuite ministre, mais sur l’équation politique de la Sangha (Ouesso) où il avait ses autres origines (sa mère était de Ouesso).
Ce n’est donc qu’après la Conférence nationale Souveraine, en 1991, dans le gouvernement de transition d’André Milongo et dans le gouvernement de Lissouba, en 1992, que les cadres de la Cuvette-Ouest ont fait véritablement irruption sur la scène politique congolaise. Lissouba en a même nommés dix fois, voire plus, dans ses gouvernements successifs.
Mais depuis le retour au pouvoir de Sassou (Sassou II), en 1997, leur nombre n’a fait que décroître. On est passé de deux ministres (Alfred Opimbat et Pierre Nzila, respectivement ministre de la Santé et ministre de l’Enseignement) entre 1997 et 2002 à un ministre à chaque nouveau gouvernement (Philippe Mvouo, qui a fait 2 deux ans au ministère de l’énergie, puis Serge Michel Odzocki, qui lui, n’a fait que 20 mois au ministère des sports et de la Jeunesse et aujourd’hui c’est le Pr Georges Marius Moyen, le Ministre actuel de la Santé et de la Population).
Ils sont devenus interchangeables et se mènent une lutte d’influence sans merci. Dans la haute fonction publique, rares sont les ressortissants de la cuvette-Ouest qui dirigent les institutions d’Etat (telles que l’Armée, les Banques, les Finances, le pétrole…). Aujourd’hui quand on voit comment sont nommés les généraux dans notre armée, généralement sur la base du courage pour avoir participer à la guerre, le courage et l’intelligence étant les choses les mieux partagées parmi les Hommes, les officiers de la Cuvette-Ouest devaient eux aussi être élevés à ces grades, même à titre posthume, pour remercier les parents des défunts. Ce sont là des actes qui valorisent chaque région. C’est vous dire, Chers Frères et Sœurs que, si nous avons un combat à mener, c’est celui-là, celui de la reconnaissance de notre région au niveau national et ce, quelles que soient nos appartenances politiques.
Chers Frères et Sœurs, la Cuvette-ouest est une douleur, c’est devenu une souffrance, nous l’avons déjà dit. Le mal est connu, les solutions aussi sont connues. La solution est politique mais le drame vient de nos propres Frères : La création de la Cuvette-Ouest en tant qu’entité administrative, n’a été possible que sur le seul dynamisme, l’exigence des populations de cette contrée qui espéraient par cette création d’une région autonome, leur rapprochement avec l’Etat central ; espérant, par leurs enfants formés, participer à la gestion du pays et aussi avoir leur part du revenu national, communiquer avec les autres citoyens à travers leur désenclavement et se développer tout comme les autres régions. Des prétentions tout à fait légitimes. Mais aujourd’hui, les gens l’ont oublié, pour eux, le malheur de la Cuvette-Ouest est résolu avec la satisfaction de leurs propres besoins. Et c’est là où le bât blesse. Cette Cuvette-Ouest est devenue un sac à provisions, une gibecière que chacun traîne avec lui, prêt à l’échanger contre un poste.
Depuis, ce combat noble et légitime du peuple de la Cuvette-Ouest a été totalement dévoyé, du fait notamment qu’il était mené sous l’effilochage des idées au niveau des leaders, avec des cadres qui pêchaient dans tous les sens comme les libellules ; au final cela a produit des enfants terribles, que l’on pourra appeler « les enfants terribles de la Cuvette-Ouest ». Résultat : les accords politiques qui sont le seul instrument du combat politique, et qui auraient pu permettre de mieux négocier l’entrée de la Cuvette-Ouest sur la scène politique nationale, n’ont plus été conclus ; ce qui explique qu’aujourd’hui les cadres de la Cuvette-Ouest sont réduits au rang de simple faire-valoir, aussi bien au plan politique et administratif qu’au plan militaire, même si certains ont obtenu quelque chose pour eux-mêmes. In fine, dans l’ensemble cela a été donc une très mauvaise opération pour notre région. Aujourd’hui, ceux de nos Frères et Sœurs qui se revendiquent du pouvoir passent leur temps à se neutraliser mutuellement par le mensonge, les manigances, la calomnie et autres acabits auprès de ceux qui détiennent l’effectivité du pouvoir. Et le pouvoir a tellement bien compris cela qu’il les a tous rendus interchangeables.
A cause de cette immaturité politique, la Cuvette-Ouest reste toujours le maillon faible du système politique et économique du Congo, un fleuve d’égoïsmes, un champ d’intrigues et de rivalités. Mais surtout elle est restée un champ d’expérimentation de la pauvreté, isolée. Le moins que l’on puisse dire, c’est que c’est vraiment dommage.
Je ne veux pas me lancer dans les jugements de valeurs, car après tout, en démocratie, chacun est libre de s’allier à qui il veut, mais je pense que pour l’avenir, nous ne pouvons plus, nous ne devons plus réduire ainsi le combat de tout un peuple au niveau de la recherche de l’intérêt personnel. Après 50 ans de passage à vide, après 50 ans d’abandon, continuer à réduire le combat de tout un peuple à la simple satisfaction des besoins individuels et égoïstes, en se cachant honteusement derrière je ne sais quel « réalisme politique », je trouve cela vraiment malheureux.
A ceux-là, je voudrais leur rappeler que c’est cette Cuvette-Ouest qui leur a ouvert la voie de la haute fonction publique et des charges électives et politiques. Ce qui n’était pas possible il y a vingt-ans. Chacun d’eux doit quelque chose à cette lutte commune. Et d’ailleurs la plupart de ceux qui font aujourd’hui la pluie et le beau temps en criant le nom de la Cuvette-Ouest sont souvent ceux-là mêmes qui se défaussaient hier quand la lutte pour sa création se corsait un peu. Ils devraient donc faire preuve d’humilité.
C- Conclusion
a- Le sens de notre démarche est simple
Nous avons été obligés de dire un certain nombre de choses pour permettre à tout le monde de bien comprendre les enjeux passés et futurs. Il faut qu’on se connaisse bien. Les ressortissants de la Cuvette-Ouest doivent savoir qu’on ne passe pas les contrats politiques que par des applaudissements. Il faut donc qu’ils soient mieux éduqués politiquement.
b- Remercier les anciens qui se sont battus avec courage et Amour pour donner forme à ce combat de la Cuvette-Ouest, ce combat de 50 ans
Nous voulons citer les signataires de la lettre de la Cuvette-Ouest en prélude à la Conférence Nationale en 1991, à savoir : Boukaka Nicolas (ressortissant de Mbomo), Engoualé Jean Pierre (ressortissant de Kellé), Lékoba Jean Pierre (ressortissant d’Etoumbi) ; Songo Aloïse (ressortissant de Kellé), ainsi que ceux qui s’étaient rendus à la rencontre d’Oyo avec Sassou, toujours en 1991, à savoir : Banangandzala Jacques (ressortissant de Yaba Mbeti - Ewo) ; Boukaka Nicolas (ressortissant de Mbomo) ; colonel Lekondza André, alias Aleck, (ressortissant de Mbomo) ; Lékoba Jean Pierre (ressortissant d’Etoumbi) ; Ombacka Raymond (ressortissant de Kellé, dont il faut saluer le courage car il était à cette époque Directeur de cabinet de Yoka Aimé Emmanuel) ; Otta Jean Joseph William (ressortissant de Kellé), Songo Aloïse (ressortissant de Kellé).
Cette rencontre d’Oyo peut être considérée comme l’acte fondateur de la Cuvette-Ouest. Et c’est particulièrement notre aîné Otta Jean Joseph William, à qui faut il faut rendre un Hommage appuyé, qui, à la demande des autres membres du groupe, avait rédigé et lu devant Sassou la lettre qui constitue cet acte fondateur de notre région.
Chacun a pu donc voir, à travers ce petit récit chronologique, que depuis l’arrivée au pouvoir des ressortissants du groupe Mbochi (Ngouabi de 1968 à 1977i, Yhombi de 1977 à 1979, Sassou de 1979 à 1992 et à nouveau Sassou de 1997 à ce jour), la relation entre le groupe Mbochi et les ressortissants de la Cuvette-Ouest, a toujours été marquée par le mépris, le désir d’asservissement et de domination du groupe au pouvoir. Entre le groupe Mbochi et les ressortissants de la Cuvette-Ouest, c’est donc « je t’aime, moi non plus ». Mais là où le bât blesse, c’est que jusqu’à présent, Sassou et les siens ont toujours réussi à faire croire aux gens du Sud que tous les gens du Nord sont en accord avec eux ; ce qui est totalement faux.
Bienvenu MABILEMONO